A Taintrux, la maison-atelier de l’artiste céramiste Thiébaut Chagué est un lieu de création artistique entièrement dédié à la céramique. C’est là que l’association « Terre-plein céramique » s’attache à faire émerger de jeunes artistes en mettant à disposition son four à bois « Anagama » et un atelier pour des résidences, situé dans l’ancienne école du village, à deux pas du jardin de l’artiste.
Mais qu’est-ce que la céramique ?
Le terme céramique vient du grec « kéramos » qui signifie « argile » ; « terre à potier ». La céramique est donc un terme générique qui désigne tous les objets fabriqués en terre qui « ont subi une transformation physico-chimique irréversible au cours d’une cuisson à température plus ou moins élevée. » Pour faire simple, la céramique englobe les poteries, les faïences, les porcelaines et les grès. On les distingue en deux catégories : les céramiques poreuses (poterie et faïences) et vitrifiées (porcelaines et grès).
Pour Thiébaut Chagué, la céramique est une source d’inspiration inépuisable. Entre 1976 et 1981, il se forme chez de grands maîtres céramistes dans divers ateliers en France, en Belgique et en Angleterre. Pierre Culot, Richard Batterham ou encore Michael Cardew seront des rencontres déterminantes pour lui. Avec eux, il découvre et comprend « la nécessité de réhabiliter le travail fait par la main dans un environnement libre et proche de la nature afin de retrouver les premiers gestes manuels et le sens sacré de l’Art primitif, qui alimentent la créativité de l’artiste ». Thiébaut voyage aussi, en Afrique et en Asie pour compléter sa formation et sa compréhension de l’art céramique.
En 1984, il s’installe à Taintrux, petit village entouré par les montagnes. C’est là qu’il décide de construire un grand four à bois à trois chambres à côté de son atelier, appelé aussi « Noborigama », qui lui permet de cuire de nombreuses pièces à la fois. En 2011, Sylvain Thirouin, le Président de « Terre-Plein céramique » et Sandrine Bringard, artiste céramiste en résidence à ce moment-là, décident de construire un four dans le jardin de l’artiste. C’est la naissance du four « Anagama ».
Un four traditionnel originaire d’Asie et unique dans les Vosges
Originaire de Chine et de Corée, puis apporté au Japon, le four anagama, qui signifie « four troglodyte » ou « four à une seule chambre », se compose d’une chambre de cuisson et de combustion à l’entrée du four. A son extrémité, un conduit de cheminée haut permet d’évacuer les fumées et d’obtenir un tirage conséquent. Il n’y a pas de séparation entre la chambre de combustion et la chambre de cuisson, ce qui permet d’obtenir d’impressionnants résultats sans utiliser d’émaux.
Contrairement aux fours électriques ou à gaz, fréquemment utilisés par la plupart des potiers modernes, l’« anagama » est alimenté au bois de chauffage. Pour la cuisson, un apport continu en combustible est nécessaire, car le bois jeté dans le four chaud est consommé très rapidement. La combustion du bois produit de la chaleur allant jusqu’à 1400°, et aussi des cendres volantes et des sels volatils : « La cendre de bois se dépose sur les pièces pendant la cuisson et l'interaction complexe entre la flamme, la cendre et les minéraux du corps d'argile forme une glaçure naturelle de cendre. Ce glacis peut présenter une grande variation de couleur, de texture et d'épaisseur, allant de lisse et brillant à rugueux et pointu. ».
Ce type de cuisson au bois fait de chaque poterie une pièce unique, selon l'argile utilisée, l'endroit dans le four où elle est placée, et les variations de température dans le four. De plus, la manière dont les pièces sont enfournées dans le four, affecte le chemin de la flamme et par conséquent l’apparence des pièces qui seront « touchées plus ou moins par les flammes ». Ici, le feu prend une dimension fondamentale dans le processus créatif de l’artiste, ce qui lui permet « de peindre avec le feu » en quelque sorte…
Le chargement d’un four anagama est la partie la plus délicate et difficile de la cuisson. Cette dernière peut durer plusieurs jours (entre 4 et 12 jours) selon le volume du four…
Cette année, la cuisson s’est déroulée du 21 au 24 octobre. L’artiste en résidence, Vincent Campos et les membres de l’association se sont relayés 24 h sur 24 pour alimenter le four.
Une cuisson anagama est un moment convivial où les visiteurs et curieux sont admis. Il est conseillé de rester discret et prudent lorsque l’on se trouve à proximité du four et de prévenir l’association si vous souhaitez assister à la cuisson. Une fois refroidi, l’ouverture du four est chargé d’émotion, car c’est à ce moment que l’on découvre le résultat de l’alchimie de la terre, de l’air, du bois et du feu…
Terre-Plein céramique, une association vivante !
L’association « Terre-Plein céramique » est un véritable tremplin pour les jeunes artistes céramistes émergeants. Elle organise des ateliers, des initiations et des expositions autour de l’art de la céramique. Elle fait vivre une technique de cuisson traditionnelle ancestrale et soutient la création artistique. A cette fin, l’association organise un appel à projets tous les ans. Cette année, elle a reçu 17 dossiers de candidatures venant du Mexique, de Russie, du Togo, et de Corée. C’est la candidature de Lucie Pillon qui a été retenue pour rejoindre au printemps prochain l’atelier de l’association.
A noter qu’en septembre 2022, le Musée Théodore Deck accueillera l’exposition des œuvres de Vincent Campos ainsi que la rétrospective de 10 ans de résidences.
Pour découvrir en images la cuisson et l’ouverture du four cliquez ici.
Pour en savoir plus sur l’association « Terre-Plein céramique » suivez ce lien : https://association-terre-plein.jimdofree.com/
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Photos © Francis BURGER